Deux anniversaires importants nous accompagneront tout au long de l'année
2023 : nous célébrerons en effet les 30 ans de Solidarité femmes, ainsi que ceux de la loi sur l'aide aux victimes d'infractions, qui constitue la base de notre travail quotidien et a également vu le jour en 1993. Grâce à la mobilisation de la société civile et à une initiative du magazine «Beobachter», la LAVI avait été acceptée par les électrices et électeurs en 1984, avec une forte majorité de 82,1 %.

Au cours de ces 30 années, notre offre s'est constamment adaptée et étoffée. Au début, Solidarité femmes a ouvert une maison d'accueil, puis un centre de consultation ambulatoire est venu s'y ajouter en l’an 2000. Différents projets ont vu le jour: la hotline 24h/24 AppElle ! a par exemple été mise sur pied en collaboration avec la Fondation contre la violence envers les femmes et les enfants ; des consultations ont été rendues possibles dans le Jura bernois ; différents projets ont été menés avec et pour les enfants et les jeunes ; une première rénovation de la maison d'accueil a eu lieu en 2009 ainsi qu'un deuxième assainissement en 2022.

L'intérêt sincère et l'ouverture de la société et de la politique pour le thème de l'aide aux victimes et la problématique de la violence domestique ont été très importants au fil des années, et le sont aujourd’hui plus que jamais. Pour rendre visible cette dynamique et développer la discussion dans le grand public, nous avons besoin de vous toutes et tous. La journée du 8 mars représente l’occasion d’attirer l'attention sur différents thèmes : l'inégalité de traitement entre les sexes qui persiste encore et toujours, ou encore l'autodétermination sur son propre corps ou sa sexualité.

Nous vous recommandons chaleureusement la manifestation du 8 mars 2023 organisée par Femmes en réseau au Filmpodium: la projection du film "CALL JANE", qui traite de la thématique de l'avortement dans les années 1960 aux Etats-Unis et projette à l'écran les défis relevés par les femmes. Un thème lié au genre qui montre de nombreux obstacles, à cette époque comme aujourd'hui. 

C'est dans cet esprit que nous vous souhaitons une riche Journée internationale de lutte féministe, et nous nous réjouissons déjà de célébrer avec vous notre anniversaire au cours du second semestre !

 

La Stratégie d'aide aux victimes du canton de Berne

En novembre 2022, le Conseil d'Etat a adopté la Stratégie cantonale d'aide aux victimes 2023-2033. Ces prochains jours, le Grand Conseil décidera s'il renvoie une partie de la Stratégie, comme l'a demandé la Commission de la santé et des affaires sociales du Grand Conseil (CSoc).

Comment en est-on arrivé là ? En novembre 2019, la motion 280-2019 Kohli "Stratégie cantonale d'aide aux victimes" a été déposée au Grand Conseil pour demander l'élaboration d'une stratégie cantonale d'aide aux victimes. Deux ans plus tard, en mars 2022, la Direction de la santé, des affaires sociales et de l'intégration (DSAS) a publié une première version de cette stratégie et a invité différents acteurs et actrices à se prononcer sur les orientations et les mesures élaborées dans le cadre d'une procédure de consultation. La version définitive de la stratégie a été approuvée par le Conseil d'Etat en novembre 2022.

Les trois services cantonaux d'aide aux victimes du canton de Berne, Solidarité femmes Bienne & région, la Fondation contre la violence envers les femmes et les enfants et la Fondation d'aide aux victimes de Berne se sont adressés au public par le biais des médias. Sur le principe, nous saluons toutes les propositions qui rendent les structures transparentes pour les personnes concernées et les prestations efficientes. Cependant, d'un point de vue professionnel, nous attirons également l'attention sur des propositions qui vont à l'encontre des objectifs de la LAVI et qui conduisent à une réduction des prestations pour les victimes d'infractions.

La régionalité est importante Pour faciliter l’accès à l’aide, les offres de consultations doivent être proposées à proximité des personnes concernées. Nous ne comprenons donc pas que les offres dans l'Oberland bernois soient supprimées dans la stratégie. Au lieu de faire disparaître des prestations dans l'Oberland bernois, les régions de la Haute-Argovie et de l'Emmental devraient désormais aussi disposer d'offres décentralisées.

Absence de groupes cibles concernés par la loi sur l'aide aux victimes La stratégie d'aide aux victimes ne parle "que" de la violence domestique. L'aide aux victimes englobe pourtant bien plus de thèmes, comme par exemple les lésions corporelles dans l'espace public, les menaces sur la vie et l'intégrité corporelle par des individus ou des bandes organisées, jusqu'aux homicides, au harcèlement, à la violence sexualisée, aux enlèvements ou à la traite des êtres humains. Une stratégie d'aide aux victimes doit impérativement prendre en compte et intégrer tous les types de délits.

L'objectif de neutralité des coûts n’est pas réaliste L’augmentation constante de la demande d'offres de protection et de consultation durant ces dernières années est ignorée dans la stratégie. La Direction de la santé, des affaires sociales et de l’intégration (DSI) n'a pas non plus tenu compte de cette évolution dans les contrats de prestations des dernières années. La pression sur les employées est énorme et la qualité des prestations en souffre. Ce n'est pas une bonne situation de départ pour une nouvelle stratégie.

Erreur fondamentale dans le domaine de la migration La nouvelle stratégie mélange les tâches du domaine de l'asile et de la migration avec celles de l'aide aux victimes. C'est techniquement faux et contraire aux objectifs de la LAVI. Dans la LAVI, la nationalité des victimes et des auteurs potentiels n'a pas d'importance, pas plus que la question de savoir si les prévenus ont pu être arrêtés ou non. Toutes les victimes d'infractions et leurs proches doivent être soutenu·e·s.

La protection des données en voie d’affaiblissement Selon la Stratégie, les données des centres d'aide aux victimes devraient désormais être partagées avec différentes autorités. Cela peut mettre en grand danger les personnes victimes de violence et exposer les collaborateurs/trices du domaine de l'aide aux victimes à des risques inutiles. La protection des données n'est pas seulement déterminante pour la sécurité, mais aussi pour la confiance des client·e·s, qui n'oseraient plus s'adresser à un centre de consultation.

La Stratégie renonce à la maison des jeunes filles et jeunes femmes Après une évaluation des besoins et un essai pilote, le Grand Conseil avait décidé de créer une maison des jeunes filles et jeunes femmes dans le canton de Berne. Cette décision n'est pas prise en compte dans la nouvelle stratégie LAVI. En lieu et place, 4 places seraient mises à disposition dans l'une des maisons d'accueil pour femmes. Mais il n'y a pas de place dans les maisons d'accueil pour femmes, il manque l'autorisation, la structure et la spécialisation professionnelle pour un accompagnement et une prise en charge adéquats des jeunes filles et jeunes femmes victimes de violence.

Nous soutenons le renvoi partiel de la stratégie proposé par la CSoc et les améliorations nécessaires dans les domaines de la protection des données, des centres de conseil décentralisés et des places de protection pour les filles. Nous sommes d'accord avec la CSoc sur le fait que la Stratégie manque d'une perspective globale et laisse de nombreuses questions en suspens concernant la mise en œuvre et la neutralité des coûts exigée. Il en va de même pour dire que les sanctions dans le domaine de la migration et de l'aide sociale en relation avec l'aide aux victimes doivent être rejetées.

Nous espérons qu'une majorité du Grand Conseil partage notre avis. La suite très bientôt...